mardi 11 juillet 2017

Empire colonial français

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Empire colonial français (fr)
Drapeau
Description de cette image, également commentée ci-après
Espaces colonisés par la France et autres territoires occupés par la France à diverses époques
Informations générales
CapitaleParis
LangueFrançais
Démographie
Population110 631 000 habitants (en 1936, Métropole incluse)
Superficie
Superficie23 500 000 km2 (dans son ensemble entre 1534 et 1962)
10 000 000 km2(de 1534 à 1815)
12 898 000 km2 (en 1936,Métropole incluse)
Histoire et événements
24 juillet 1534Grand Royal Coat of Arms of France.svg
Prise de possession et colonisation du Canada (début du premier espace colonial)
4 février 1794Abolition de l'esclavage des noirs dans les colonies françaises
30 avril 1803Vente de la Louisiane française(fin du premier espace colonial)
18 mai 1804Grandes Armes Impériales (1804-1815)2.svg
L'Empire français est proclamé (début de l'époque napoléonienne)
5 juillet 1830Prise d'Alger et colonisation de l'Algérie (début du second espace colonial)
27 avril 1848Abolition de l'esclavage dans les colonies françaises
6 mai - 15 novembre 1931Exposition coloniale internationale de Paris
27 octobre 1946Remplacement de l'Empire colonial français par l'Union française et les DOM-TOM, abolition de l'indigénat
4 octobre 1958Armoiries république française.svg
Remplacement de l'Union française par la Communauté française (début des indépendances)
30 juillet 1980Indépendance du Vanuatu
L’Empire colonial français était l'ensemble des colonies, protectorats, territoires sous mandat et territoires sous tutelle gouvernés ou administrés par la France. Commencé au xvie siècle, il a connu une évolution très contrastée selon les époques, aussi bien par son étendue que par sa population ou sa richesse. Les possessions coloniales ont connu différents statuts et modes d'exploitation, des colonies antillaises esclavagistes du xviie siècle et du xviiie siècle à l'Algérie française, partie intégrante de la France à certaines périodes, en passant par les protectorats de Tunisie et du Maroc et les territoires sous mandat de Syrie et du Liban.
On distingue généralement deux périodes concernant les empires coloniaux français, le pivot étant la période couvrant la Révolution et l'époque napoléonienne au cours desquelles la France perdit les derniers restes de sa première aventure coloniale. Le premier espace colonial, constitué à partir du xvie siècle comprend des territoires nord-américains, quelques îles des Antilles, les Mascareignes et des établissements en Inde et en Afrique. Le Ier empire colonial s'étendait sur 10 000 000 km21,2. La Guerre de Sept Ans, qui met un frein aux ambitions coloniales de la France, se solde par la perte de la majorité des territoires nord-américains et en Inde à l'exception de quelques comptoirs. Il survit malgré tout et connaît une certaine prospérité grâce aux exportations antillaises (Saint-Domingue, Martinique, Guadeloupe) de café et surtout de sucre entre 1763 et la fin des années 1780. Il s'effondre brutalement dans la décennie suivante avant de disparaître presque entièrement durant l'époque napoléonienne.
Le second espace colonial, constitué à partir des années 1830, se compose principalement de régions d'Afrique acquises à partir des anciens comptoirs, mais aussi d'Asie (Indochine) et d'Océanie (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Nouvelles-Hébrides). Ce second empire colonial fut au cours de la seconde moitié du xixe et au xxe siècle le deuxième plus vaste du monde, derrière l'Empire colonial britannique. Présent sur tous les continents, il s'étendait à son apogée, de 1919 à 1939, sur 12 347 000 km2. En incluant la France métropolitaine, les terres sous souveraineté française atteignaient ainsi la superficie de 12 898 000 km2, soit près d’1/10 de la surface de la Terre, abritant une population de 110 millions d'habitants à la veille de la Seconde Guerre mondiale, soit 5 % de la population mondiale à l'époque.
Aujourd'hui, les restes de ce large empire colonial constituent la France d'outre-mer (ou « DOM-TOM »), une douzaine de territoires insulaires dans l'Atlantique, les Antilles, l'océan Indien, le Pacifique Sud, au large de l'Antarctique, ainsi que la Guyane sur la côte nord de l'Amérique du Sud, pour une superficie émergée totale de 119 394 km2, soit à peine 1 % de la superficie de l'empire colonial à son apogée entre les deux guerres mondiales. D'une faible superficie émergée, ces DOM-TOM permettent toutefois à la France de revendiquer la deuxième plus grande zone économique exclusive (ZEE) au monde, couvrant 11 035 000 km2 d'océans, juste derrière celle des États-Unis. Il vivait en 2013 dans ces territoires 2 691 000 personnes qui jouissent d'une représentation politique au niveau national, ainsi que de divers degrés d'autonomie.

Le premier empire colonial[modifier | modifier le code]

Évolution de l'Empire colonial français
  •      Premier espace colonial
  •      Second espace colonial
Il est composé principalement par des possessions de la Nouvelle-France, aux Antilles, aux Indes, ainsi que des comptoirs et d'îles parsemées.
À partir de 1534, les Français explorent le canal du Saint-Laurent. La Nouvelle-France est fondée.
Le premier espace colonial français est l'espace colonial issu des conquêtes monarchiques. Les désignations suivantes lui correspondent : « premier empire colonial », « empire royal », « empire monarchique » car il a été créé majoritairement par des régimes monarchiques Royaume de France (Premier Empire), « empire colonial français moderne » (datant de l'époque moderne).
Les justifications de la colonisation française ont évolué avec le temps. À l'origine, la rivalité de puissance avec l'empire austro-espagnol de Charles Quint (François Ier exigeait de voir la « clause du testament d'Adam » qui avait laissé le monopole de l'Amérique aux Espagnols et aux Portugais lors de la signature de traité de Tordesillas).
Deuxième justification, la propagation de la foi chrétienne (missions). Au xviie siècle, les établissements des Antilles françaises vivent de contrebande et de piraterie aux dépens des colonies espagnoles et hollandaises plus prospères.
Puis vient la justification physiocratique : les colonies doivent fournir les cultures exotiques que la métropole n'assure pas (sucre, café, indigo). Comme les colons français sont peu nombreux, on fait venir en masse des esclaves africains.
À la Révolution, s'opposent les partisans du réalisme économique (pas de colonies sans esclaves) et ceux des principes égalitaires (« périssent les colonies plutôt qu'un principe »).
En Inde, les Français commencèrent à vouloir s'implanter de façon significative grâce à la politique de Joseph François Dupleix entre 1719 et 1763. Les efforts de ce dernier furent néanmoins ruinés après la conclusion du traité de Paris en 1763.
Les Antilles françaises
En Amérique, la Nouvelle-France s’accroît de façon spectaculaire et comprend presque la moitié de l'Amérique du Nord. Elle forme quatre colonies dont l'Acadie, le Canada, Terre-Neuve, et la Louisiane. Après le traités d'Utrecht en 1713, elle perd l'Acadie (partie sud), la Baie-d'Hudson, et Terre-Neuve (Plaisance). Cependant, elle forme deux nouvelles colonies : l'isle Royale et isle Saint-Jean. Tout s'écroule au traité de Paris en 1763, après la Guerre de Sept Ans, où elle perd le Canada, l'Acadie, isle Royale, isle Saint-Jean, et la partie est du Mississippi, qui faisait partie de la Louisiane, et la partie ouest qui revient à l'Espagne, pour sa perte de la Floride aux dépens des Anglais. La France reprit la Louisiane occidentale à condition de ne pas la vendre ni à l'Angleterre et ni aux Américains, ce que Napoléon fit trois ans plus tard, sans l'appui ou l'approbation de l'Assemblée Nationale en 1803. L'Amérique du Nord devient alors en majorité anglophone.
En 1804, les Français perdent le dernier fleuron de leur premier empire colonial : la colonie de Saint-Domingue proclame son indépendance et devient la République d'Haïti.
Après la chute du Premier Empire, la France ne conserve que quelques possessions : les cinq comptoirs des établissements français de l'Inde, La Réunion3, l'île de Gorée au Sénégal, quelques îles des Antilles (Guadeloupe, Martinique, Saint-Martin…), ainsi que la Guyane et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Second empire colonial[modifier | modifier le code]

Empire colonial français en 1920
Article détaillé : Second empire colonial français.
La politique coloniale du Second Empire porte l'empreinte de Napoléon III et de son ministre de la Marine et des Colonies Chasseloup-Laubat. Ce dernier entreprend une modernisation de la marine de guerre (cuirassés à hélices) qui doit permettre d'améliorer la capacité d'intervention des troupes coloniales. La superficie du domaine colonial triple sous le Second Empire jusqu'à atteindre un million de km² pour cinq millions d'habitants.
Chronologiquement, l'annexion définitive de la Nouvelle-Calédonie en 1853 constitue la première action coloniale de l'Empereur. En Afrique, il nomme Faidherbe au poste de gouverneur du Sénégal. S'ensuivront la fondation du port de Dakar et la création du corps des tirailleurs sénégalais. L'implantation du comptoir des Rivières du Sud en 1859, puis l'acquisition de la côte du Gabon en 1862 sont les principales étapes de la pénétration française en Afrique de l'Ouest.
Colonies françaises en 1891 (Le Monde Illustré)
En Afrique de l'Est, Napoléon III signe en 1862 un traité de commerce avec Madagascar où s'installe un consulat de France. La politique impériale vise principalement de ce côté de l'Afrique à contrer l'influence britannique. La même année, la France obtient d'un chef local la cession du petit territoire d'Obock sur la côte nord du golfe de Tadjourah, mais elle n'y procède à aucune occupation effective pendant vingt ans, se contentant de réaffirmer sa souveraineté de loin en loin en faisant hisser les couleurs nationales par l'équipage d'un bâtiment naval de passage4. Au Maghreb, il renforce la présence des conseillers militaires français dans l'armée du bey de Tunis.
Le Second Empire étend le domaine français en Algérie et entreprend la conquête de la Cochinchine et du Cambodge, de la Nouvelle-Calédonie, de nombreuses îles dans le Pacifique (aujourd'hui en Polynésie française) et du Sénégal. Un décret impérial du 2 juin 1848 crée les départements français d'Algérie.
En Europe, Napoléon III exerce sa politique expansionniste par l'annexion de la Savoie et du Comté de Nice en 1860 par le traité de Turin. Le Sénatus-consulte du 12 juin 1860 a enregistré les dispositions de ces annexions.
Plus limitée, et surveillée en Europe après la défaite napoléonienne, la France se lance dans la conquête de l'Afrique avec la campagne d'Algérie (1830-1847). Puis elle colonise la majeure partie de l’Afrique occidentale et équatoriale, l'Indochine, ainsi que de nombreuses îles d'Océanie. Ce second espace atteint son apogée après la Première Guerre mondiale, lorsque la France reçoit de la Société des Nations un mandat sur la Syrie et le Liban.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, les territoires français d'Outre-mer sont un enjeu central : entre l'été 1940 et la mi-1943, la quasi-totalité bascule dans le camp des forces de résistance.
L'Empire triomphant
Malgré des tentatives d'intégration plus grande des colonies dans la République (Union française en 1946), celles-ci restent dans un état de sujétion, et leurs élites et populations ne se satisfont plus de cet état de fait. La décolonisation de l'Afrique occidentale et de l'Asie diminue drastiquement l'étendue de l'outre-mer français entre 1954 (accords de Genève) et 1962 (accords d'Évian). Celui-ci se limite alors aux départements d'outre-mer, déjà intégrés à la République, aux colonies du Pacifique, et à quelques possessions résiduelles. Entre 1975 et 1980, trois colonies obtiennent l'indépendance, achevant la décolonisation de l'Afrique : les Comores sauf Mayotte, les Afars et Issas et les Nouvelles-Hébrides.
Après cette date, la France oscille entre intégration croissante des territoires à la République (les DOM deviennent des régions d'outre-mer, Mayotte accède à ce statut en 2011), et reconnaissance de leurs spécificités, avec le statut de collectivité d'outre-mer. La seule ancienne colonie dont le statut pose problème depuis le milieu des années 1980 est la Nouvelle-Calédonie, dont l'indépendance sera soumise à référendum entre 2014 et 2020.

Démographie[modifier | modifier le code]

Évolution de la population entre les deux guerres mondiales[modifier | modifier le code]

Empire français 1919-1939.png
Population de l'Empire colonial français entre 1919 et 1939

 1921  1926  1931  1936 
France métropolitaine39 140 00040 710 00041 550 00041 500 000
Colonies, protectorats et mandats55 556 00059 474 00064 293 00069 131 000
Total94 696 000100 184 000105 843 000110 631 000
Pourcentage de la population mondiale5,02 %5,01 %5,11 %5,15 %
Source Insee5, SGF6

L'esclavage dans l'Empire colonial français[modifier | modifier le code]

Entre les premières installations de colons au xvie siècle et le décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848, soit deux siècles, environ quatre millions d’esclaves (2 millions nés en Afrique et 2 millions nés dans les colonies) ont vécu dans les territoires sous domination française7.
Pendant cette période, le développement des plantations entraîne l'essor de ports négriers tels que Nantes et Bordeaux. Les échanges s'effectuent majoritairement avec les Antilles françaises et reposent sur le commerce triangulaire.

Contexte[modifier | modifier le code]

La traite atlantique, faite par les Européens et les Américains, a déporté 12 à 13 millions de Noirs, dont l'essentiel à partir de la fin du xviie siècle. En 1997, l'historien Hugh Thomasdonnait un total de 13 000 000 d'esclaves « ayant quitté l'Afrique » lors de la traite atlantique, dont 11 328 000 arrivés à destination au moyen de 54 200 traversées8. Tous les grands ports européens ont pratiqué la traite négrière mais avec une importance différente. Les ports anglais sont en première ligne ; ainsi Liverpool organise 4 894 expéditions et Londres2 704.

Population des colonies françaises esclavagistes[modifier | modifier le code]

En 1788-1790, le nombre d’esclaves, plus de 780 000, représentent près de 90% de la population des colonies françaises esclavagistes 9 :
ColonieAnnéeBlancsLibres de couleursEsclavesTotal
Saint-Domingue179027 71721 800495 528546 835
Guadeloupe178813 9693 12589 823108 705
Martinique178910 6355 23581 13098 789
Réunion17888 1821 02937 98448 983
Maurice17884 4572 45637 91546 616
Sainte-Lucie17882 1591 58817 22122 756
Tobago178842523112 63915 083
Guyane17891 30749410 74814 338
Ensemble
54 06935 958782 988873 015
Proportion
6%4%90%100%

Origines géographique des esclaves[modifier | modifier le code]

Les esclaves africains importés dans les colonies françaises venaient essentiellement d'une région comprise entre le Sénégal et l'Angola.

Destination des esclaves dans les différentes colonies[modifier | modifier le code]

Les destinations des esclaves importés dans les colonies étaient les suivantes10:
TerritoireEsclaves importés
Saint-Domingue (aujourd'hui Haïti)864 000
Martinique366 000
Guadeloupe291 000
Ile Bourbon (Réunion)130 000
Ile de France (Ile Maurice)80 000
Guyane51 000
Louisiane10 000
Saint-Vincent, Sainte-Lucie, Tobago, Dominique, Grenade137 000
Total1 929 000

Les ports négriers français[modifier | modifier le code]

La France métropolitaine arma environ 4 220 navires négriers et se classe au troisième rang des nations négrières après la Grande-Bretagne et le Portugal11. La ville de Nantes organisa à elle seule 1 744 expéditions soit 41,3 % du total français. Suivent trois villes avec par ordre d'importance : Bordeaux, La Rochelle et Le Havre qui totalisent à elles trois 33,5 % des expéditions négrières12.

La hiérarchie de la société coloniale[modifier | modifier le code]

Les colonies pratiquant l'esclavage, ont en en commun mise en place progressive d’une société tripartite composée de blancs, de « libres de couleur » (descendant d’Africain, métis ou non) et d’esclaves. Les Blancs se trouvent au sommet de cette hiérarchie et se divisent essentiellement en deux catégories : les négociants et les grands propriétaires fonciers dans le domaine du sucre. Viennent ensuite, les « libres de couleur » qui forment la seconde catégorie dans la hiérarchie coloniale. L'expression « libres de couleur » désigne une des classes juridiques instituées dans les colonies françaises avant l'abolition de l'esclavage. Elle apparaît dans les ordonnances locales et royales promulguées dans les années 1720 à Saint-Domingue pour marquer la distinction avec les « nègres affranchis ». Cet usage se démarque alors des articles du Code noir de 1685 qui ne faisait pas de différence entre l’ensemble des gens libres. Par la suite, l'expression « libre de couleur » désigne aussi bien les métis que les Noirs libres13. Les libres de couleurs restent malgré tout victime de ségrégation et ne bénéficie pas des mêmes droits que les blancs. Ainsi, par exemple, les affranchis, les Noirs et câpres libres sont écartés de la citoyenneté active. Les libres de naissance légitimes ou illégitimes, mulâtres et ceux plus clairs peuvent être électeurs mais seuls les mamelouks (1/16 de « sang noir ») légitimes sont éligibles. S’agissant de la hiérarchie entre les esclaves, la principale distinction est effectuée en fonction de la couleur. À Saint-Domingue, en Guadeloupe et en Martinique, les union légitimes ou non entre Blancs et non-blancs sont fréquentes donnant lieu à un nombre significatifs de métis (12 à 14% des esclaves en Guadeloupe en 1770-1794 sont des métis). La systématisation et la radicalisation de l’emploi des nuances de métissage dans les registres paroissiaux arrivent après la guerre de Sept Ans (1756-1763). Les termes suivants étaient utilisés dans les registres paroissiaux puis dans les actes d'état-civil en fonction des différents degrés de métissage 14,15,16:
Proportion d'ancêtres noirsSaint-DomingueGuadeloupe/Martinique
7/8Sacatra-
3/4GriffeCapre
5/8Marabou-
1/2MulâtreMulâtre
1/4QuarteronMétis
1/8MétisQuarteron
1/16MameloukMamelouk
1/32Quarteronné-
1/64Sang-mêlé-

Abolition de l'esclavage dans les colonies[modifier | modifier le code]

L'esclavage est aboli une première fois en 1794 (plus de 700 000 personnes sont alors esclaves), mais cela fut sans effet réel dans les colonies, sauf à la Guadeloupe, où la décision de 1794 commença à être appliquée.
En mai 1802 (27 Floréal an X), Napoléon Bonaparte rétablit l'esclavage selon les dispositions antérieures à 1789. Par ailleurs, en métropole, des mesures discriminatoires sont prises à l'encontre des Noirs et « gens de couleur  ». Le 29 mai 1802, les officiers de couleur sont exclus de l'armée ; le 2 juillet, le territoire métropolitain est interdit aux Noirs et « gens de couleur  » puis le 8 janvier 1803, les mariages mixtes « entre des blancs et des négresses » et « entre des nègres et des blanches » sont interdits17,18.
Ce n'est qu'en 1848 que la France abolit définitivement l’esclavage dans ses colonies. Près de 248 500 esclaves sont alors libérés (plus de 87 000 en Guadeloupe, près de 74 450 en Martinique, plus de 62 000 à La Réunion, 12 500 en Guyane, plus de 10 000 au Sénégal).

Bilan de la colonisation française en Afrique[modifier | modifier le code]

Politique[modifier | modifier le code]

Commandant Léon de Beylié en 1889
Les historiens, après les militants anticolonialistes en leur temps, soulignent classiquement l'incohérence existant entre l'affirmation des principes républicains par la France (« Liberté, Égalité, Fraternité ») et la pratique autoritaire de la colonisation, notamment par l'intermédiaire du Code de l'Indigénat et du travail forcé qui, malgré son interdiction par une Convention de 1930 de la Société des Nations – ratifiée par la France en 1937 – subsista dans les colonies françaises d'Afrique et en Nouvelle-Calédonie jusqu'en 194619.
L'idée que la colonisation en Afrique a bâti des États dont les frontières ne correspondent pas au découpage ethnique, séparant certaines ethniesentre plusieurs États, ou en rassemblant plusieurs dans le même, est un argument souvent utilisé. Néanmoins, de nombreux chercheurs la remettent en question : en premier lieu parce que le concept d'ethnie lui-même est contesté ; d'autre part parce que l'entreprise coloniale n'est pas un phénomène homogène : dans certains cas, les frontières ont en effet été tracées « à la règle », état de fait consultable sur n'importe quelle carte de l'Afrique, mais dans d'autres cas, le tracement fut effectué après expertise de missions dépêchées sur le terrain, qui recueillaient un certain nombre d'informations sur les régions concernées. Ainsi, la frontière entre le Niger et le Nigeria fut tracée suite à une expédition mené par le commandant Moll entre 1903 et 190420.
Le bilan politique général de la présence française en Afrique reste toutefois l'anéantissement ou la désorganisation des structures de pouvoir pré-existantes à l'entreprise coloniale (par exemple, l'empire toucouleur, installé sur une grande partie de la vallée du fleuve Niger) et leur remplacement par des États calqués sur le modèle français. Par ailleurs, l'action de l'administration coloniale a installé les conditions de la corruption politique dans les pays africains. En effet, l'éducation en langue française n'ayant été dispensée, durant la colonisation, qu'à une minorité d'africains, ceux à qui furent donnés les rênes de la plupart des pays lors des décolonisations, pour la plupart pacifiques, furent les membres de cette classe privilégiée récemment créée. Ainsi, dans un ouvrage sur la corruption en Afrique, les anthropologues Giorgio Blundo et Olivier de Sardan écrivent : « La situation coloniale engendre [...] une relation particulière à la gestion de la chose publique et cristallise une série de comportements et de rapports de pouvoir qui créent un terreau favorable à la corruption, entendue au sens moderne du terme21 ». Cet état de fait pose aussi la question de l'inadéquation d'un modèle étatique construit selon les réalités du colon (le modèle français) et appliqués à la réalité des pays concernés : la plupart des États indépendants furent contrôlés, à la décolonisation, par des politiciens indigènes de langue française alors même que la majorité du peuple des pays concernés ne reconnaissait pas forcément l'usage de cette langue. Ces élites nouvelles eurent par ailleurs tendance, du fait de leur « avantage » linguistique, à développer des réseaux diplomatiques privilégiés avec la France : cela pose aujourd'hui la question du néocolonialisme.

Éducation[modifier | modifier le code]

La scolarisation de l'Indochine au sein de l'empire français atteint 25 %. En Algérie, elle passe dans les centres urbains, au cours de la guerre de libération nationale, de 15 % à un tiers22.
Concernant l'Afrique noire, le député Léopold Sédar Senghor faisait remarquer à la tribune de l'Assemblée, en mars 1946, qu'en Afrique occidentale française « 108 911 élèves seulement fréquentent les établissements du premier et du second degré, enseignement privé compris, sur 2 700 000 garçons et filles d’âge scolaire ; c’est-à-dire qu’un seul enfant sur 24 peut trouver place à l’école. Dans les trois lycées d’A-OF, on ne compte que 172 Africains sur 723 élèves des classes secondaires », ajoutant « On fait de l’inégalité un principe de gouvernement en s’opposant par tous les moyens possibles à ce que les autochtones aient des diplômes d’État et puissent, en conséquence, occuper d’autres fonctions que subalternes23. » Ce n'est qu'au cours de la dernière décennie de la période coloniale que la situation devait s'améliorer sensiblement.
À la fin de la période coloniale, la France a porté également ses efforts vers la formation puisque 96 % des instituteurs étaient africains au moment de l'indépendance. Les 4 % restant sont représentés par 28 000 enseignants français exerçant dans la seule Afrique (Afrique du Nord comprise), soit un huitième du corps professoral national[Source?].

Santé[modifier | modifier le code]

En matière de santé, de nombreuses maladies ont été éradiquées par la présence française. Adrien Loir, Albert Calmette, Alexandre Yersin, Émile Marchoux, Maurice et Charles Nicolle sont des microbiologistes et bactériologistes ayant fait leurs débuts dans la médecine militaire, navale, et dans les colonies qui deviennent terres d'élection de la bactériologie24. Alphonse Laveran est un pionnier de la médecine tropicale qui découvre en 1880 le parasite protozoaire responsable du paludisme. Le docteur Jean Robic, pour lutter contre la peste à Madagascar à la fin du xixe siècle, et faute de temps, s'est lui-même transformé en cobaye afin de tester le vaccin pour gagner la course contre la mort. Leurs travaux sanitaire ainsi que la mise en place d'hôpitaux et d'une police sanitaire (cordons sanitaires, services de quarantaine dans les ports, lazarets) ont permis notamment de fortement diminuer la mortalité infantile dans l'Afrique noire colonisée25.
À la date de 1960, la France avait fait bâtir en Afrique 2 000 dispensaires en état de fonctionnement, 600 maternités, 40 hôpitaux en Afrique noire et à Madagascar.

Infrastructures[modifier | modifier le code]

Question book-4.svg
[afficher]Cette section ne cite pas suffisamment ses sources (décembre 2012)
À la décolonisation, les territoires colonisés par la France en Afrique comptaient un certain nombre d'infrastructures (maternités, hôpitaux, voies ferrées, routes, ports, aérodromes, écoles) construites sous l'administration coloniale. Certaines personnalités notent en conséquence le caractère « positif » de la colonisation, ce que d'autres contestent, en témoigne la polémique qui concerna, en 2005, le contenu de l'article 4 de la loi portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés. Cette question est traitée dans l'article suivant : Bilan économique de la colonisation en Afrique#D.C3.A9bats.

Bilan économique global[modifier | modifier le code]

Les colonies africaines n'ont pas, en première approximation, rapporté d'argent à la Métropole. Les investissements dans les infrastructures en Afrique et les subventions aux productions agricoles des colonies ont coûté plus cher que ce que les colonies ont rapporté à la métropole d'un point de vue strictement comptable. L'historien économique Jacques Marseille chiffre à 70 milliards de francs-or (courant 1913) le déficit global de la colonisation en Afrique, soit l'équivalent de trois fois le montant de l'aide Marshall pour la France26. Par contre, la colonisation a apporté les ressources (en personnel, minerais, hydrocarbures) nécessaires au développement de l'économie française[réf. nécessaire], ainsi qu'une influence politique qui aujourd'hui encore favorise l'exploitation de ressources par les entreprises françaises : exploitation de l'uranium au Niger par Areva, du pétrole et du gaz algérien par Total.

Héritage de la colonisation française en Afrique[modifier | modifier le code]

Apport à la présence de la langue française dans le monde[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Francisation Article détaillé : Organisation internationale de la francophonie

Anciennes colonies françaises d'Afrique subsaharienne[modifier | modifier le code]

Les Africains participent à la vie politique française, surtout à partir de 1946, date de l'adoption de la loi Lamine Guèye et de la naissance de l'Union française.
On trouve à l'assemblée nationale les Sénégalais Lamine Gueye et Léopold Sédar Senghor, l'Ivoirien Félix Houphouët-Boigny, le Dahoméen Sourou Migan Apithy, le Congolais Jean-Félix Tchicaya ; Léopold Sédar Senghor entre au gouvernement comme secrétaire d'État à la présidence du Conseil en 1955, et Félix Houphouët-Boigny en 1956 et « participera à la loi cadre qui prépare l'indépendance (...) de l'Afrique noire sous domination française27. »

Africains subsahariens en France métropolitaine[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Noirs en France.
« On peut s'appuyer sur les recensements qui font passer la population d'Afrique subsaharienne résidant en métropole de 13 517 personnes en 1946 à 17 797 personnes en 1962. »28

Anciennes colonies françaises d'Afrique du Nord[modifier | modifier le code]

Pour ce qui concerne les anciennes colonies maghrébines musulmanes d'Afrique française du Nord, les choses se sont passées différemment et pour plusieurs raisons. De 1940 à 1945, 500 000 Maghrébins prirent part au conflit dans les forces françaises. De 1947 à 1954, le nombre d'immigrés en provenance du Maghreb dépassera le million29. Pascal Blanchard, Eric Deroo, Driss El Yazami, Pierre Fournié, Gilles Manceron disent à ce sujet : « Dans son étude sur les flux migratoires venus d'Algérie, Jacques Simon rappelle30 que, pour ces « travailleurs », la venue en France apparaît comme « le seul moyen d'échapper à la misère et à l'oppression coloniale ». Ils dressent la description suivante des conditions d'hébergement : « des lieux parfaitement impropres à l'habitation humaine ont été découverts à Paris, notent les services sociaux de la préfecture de la Seine, des caves, des greniers, d'anciens abris bétonnés, des tours d'usine servant de refuge à une population misérable. » Apparaissent les bidonvilles comme à Nanterre où vivent près de huit mille Maghrébins31 »32.

Notes et références

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