Abdallah b. Masaoud crut au Prophète

bien avant que celui-ci ne prît la maison d'al-Arqam comme lieu de
réunion. Il est l'un des six premiers musulmans, mais aussi un
rapporteur des hadiths. Ainsi, en parlant de sa première rencontre avec
le Prophète

, il dit : « J'étais un jeune garçon travaillant comme berger au service de Ouqba b. Abou Mouâyt, quand le Prophète

et Abou Bakr vinrent à moi, pour me dire : « Jeune homme, as-tu un peu
de lait à boire ? » Je leur dis : « On m'a confié ce troupeau, donc je
ne peux pas vous donner à boire. » Le Prophète

me dit : « As-tu une brebis qui ne donne pas de lait, non encore
saillie par le mâle ? » Je lui dis : « Oui. » Puis, je l'apportai. Le
Prophète

la prit, essuya le pis puis invoqua Dieu, si bien que le lait afflua
dans le pis. Alors, Abou Bakr alla apporter une pierre en forme de
creux. Le Prophète

y tira du lait puis donna à boire à Abou Bakr et à moi aussi. Ensuite,
il dit au pis : « Contracte-toi. » Le pis se contracta alors. Après
cela, j'allai trouver le Prophète

et je lui dis de m'apprendre ce discours-là...»
* * *
Ce jour-là, Ibn Masaoud ne savait pas qu'il allait croire en la mission du Prophète

et devenir le premier musulman qui réciterait à voix haute le Coran
devant les notables polythéistes qui ne croyaient pas leurs yeux et
leurs oreilles.
Oui, ce pauvre berger qui vivait de son salaire
osa se présenter devant l'assemblée des notables de Qouraych, alors
assis près de la Kaâba, pour leur faire entendre des versets coraniques.
Pour preuve, voici le témoignage d'az-Zoubayr b. al-Awam : « Abdallah
b. Masaoud est le premier, après le Messager

à faire entendre le Coran à la Mecque. Un jour, les compagnons du Messager

se sont dit : « Par Dieu, les Qouraych n'ont pas encore entendu le
Coran se réciter à eux... Y a-t-il quelqu'un qui va le leur faire
entendre ? » Abdallah b. Masaoud a dit : « Moi, je le ferai. » Ils ont
dit : « On craint pour toi leur réaction. On veut plutôt quelqu'un qui
peut être défendu par son clan ... » Il a dit : « Laissez-moi. Dieu va
me protéger d'eux. »
Après quoi, Ibn Masaoud s'en alla en plein jour
à la station d'Abraham, où il récita Au nom de Dieu, le tout
miséricordieux, le très miséricordieux : * Le tout miséricorde! * Il
enseigna le Coran *ayant créé l'homme * Il lui enseigna de s'exprimer
clairement * Le soleil et la lune au calcul obéissent * la pousse
végétale et l'arbre se prosternent (s. 55, v.1 à 6). Les notables qui
étaient assis tout près dans leur cercle se sont levés et se sont mis à
le frapper, pendant que lui récitait... Quand il est retourné à ses
compagnons, ces derniers ont dit : « Voilà ce que nous avons craint pour
toi. » Il leur a alors dit : « Si vous voulez, je recommencerai cela
demain. »
* * *
Ibn Masaoud était un pauvre, sans fortune et
sans rang social. Mais sa conversion bouleversa sa vie, si bien qu'il
devint l'un des plus éminents savants de la communauté musulmane. « J'ai
appris de la bouche du Messager

soixante-dix sourates, dit-il, et personne n'a pu faire comme moi. »
C'est comme, si Dieu avait voulu le récompenser
pour ce qu'il avait fait à la station d'Abraham. Dieu l'avait en effet
doté du don de bien réciter le Coran et de comprendre correctement le
sens des versets. Le Prophète

conseillait toujours à ses compagnons d'écouter et de réciter la récitation d'Ibn Masaoud.
Un jour, le Prophète

appela Ibn Masaoud et lui demanda de lui faire une récitation. Le
compagnon, étonné, dit : « Moi je te fais une récitation, alors que
c'est sur toi que le Coran est descendu, ô Messager de Dieu. - C'est que
j'aime l'entendre de quelqu'un d'autre, dit le Messager

. »
En outre, Ibn Masaoud était pétri de grandes
qualités, si bien que ses compagnons l'ont immortalisé par leurs
témoignages. Omar b. al-Khattab : « Il est plein de science
(religieuse). » Abou Mousa al-Achâry : « Ne m'interrogez sur aucune
chose aussi longtemps que ce savant est parmi vous. » Ali b. Abou Talib :
« Il a récité le Coran, si bien qu'il en a observé la chose licite et
la chose interdite ; il est savant en religion, connaissant de la sunna.
»
Par ailleurs, il était très proche du Prophète

. Abou Mousa al-Achâry avait dit de lui : « J'ai vu le Prophète

, ainsi qu'Ibn Masaoud qui était comme un membre de sa famille. » Quant au Prophète

, il avait dit de lui : « Si j'avais à désigner un émir sans la consultation des musulmans, je désignerais Ibn Oum Abd. »
De plus, il avait la permission de frapper à la porte du Prophète

à n'importe quel moment. C'est pourquoi ses compagnons avaient laissé
ce témoignage : « Il lui était permis d'entrer chez le Prophète, quand
cela ne l'était pas permis pour nous. » En outre, Ibn Masaoud, était
d'une grande humilité et vouait un grand respect au Prophète

, malgré la fréquentation quasi-permanente.
Bien après la disparition du Prophète

,
quand il commençait à rapporter un hadith, il se mettait à trembler de
peur qu'il n'oubliât quelque passage du hadith. Alqama b. Qays dit : «
Chaque jeudi soir, Abdallah b. Masaoud communiquait des hadiths du
Prophète

, et plus d'une fois je l'entendais dire. « Le Messager de Dieu a dit... », appuyé sur sa canne qui tremblait. »
* * *
Sa vie était une vie de militant. Il ne se sépara jamais du Prophète

,
il participa à toutes les batailles et à de nombreuses expéditions. Le
khalife Omar b. al-Khattab le chargea du Trésor public de Koufa. Plus
tard, quand le khalife Othman b. Affan décida de le démettre de ses
fonctions, il dit aux habitants de Koufa, qui voulaient le garder : « Je
dois lui obéir. Et puis, il va y avoir des troubles, alors je ne veux
pas être le premier qui ouvrira leurs portes. »
Bien sûr, il eut des divergences avec le
khalife Othman, si bien que son salaire fut suspendu. Mais il ne dit
aucun mal sur lui. Bien plutôt, il prit sa défense et mit en garde les
gens, quand il vit les signes de la révolte. En outre, il était doté
d'une sagesse pénétrante. Il avait dit, entre autres : « La meilleure
des richesses est celle de l'âme ; le meilleur viatique est le fait de
se prémunir, le plus mauvais égarement est celui du coeur ; la plus
grave des fautes est le mensonge; le plus mauvais gain est l'usure ;
manger le bien de l'orphelin est le plus mauvais manger ; celui qui
pardonne, Dieu lui pardonne. »
* * *
Ibn Masaoud vécut assez pour assister à
l'ouverture des premières portes des deux grands empires de l'époque,
ainsi qu'à l'affluence des richesses, auxquelles d'ailleurs il
n'attachait aucune importance. Il ne désira rien de cet ici-bas. Son
seul voeu était celui qui refaisait surface à chaque fois qu'il se
rappelait une nuit bien particulière.
« Par une nuit, disait-il, lors de l'expédition
de Tabouk, j'ai vu une torche à côté du lieu où nous avons campé. Je
suis allé vers elle, pour voir. Là, j'ai vu le Messager

, Abou Bakr et Omar en train d'enterrer Abdallah dhou l-Bijaday al-Mouzni. Le Messager

,
qui était dans la tombe, disait : « Faites approcher votre frère...»
Quand Abou Bakr et Omar ont rapproché le corps, le Messager

l'a pris et l'a mis dans la tombe, puis il a dit : « Mon Dieu! je suis
satisfait de lui. Sois satisfait de lui. » Ah! si j'étais l'occupant de
cette tombe-lâ ! »
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