11 Septembre : les Américains pourront-ils porter plainte contre l'Arabie saoudite ?
Si la loi était appliquée, il pourrait y avoir des "conséquences désastreuses et graves" sur l'alliance historique entre Riyad et Washington.
SOURCE AFP
Publié le | Le Point.fr
Une loi américaine va autoriser des survivants et proches de victimes du « terrorisme » à poursuivre en justice des États étrangers. Dans le viseur : l'Arabie saoudite soupçonnée un temps d'avoir joué un rôle dans les attentats du 11 Septembre. Le Sénat et la Chambre des représentants du Congrès des États-Unisont rejeté mercredi à une très large majorité un veto du président Barack Obama sur cette législation, qui ne mentionne pas explicitement Riyad, mais qui risque d'avoir des « conséquences désastreuses et graves » sur son alliance historique avec Washington, a tonné jeudi soir la diplomatie saoudienne. La monarchie pétrolière sunnite a toujours nié la moindre implication dans les attentats du 11 septembre 2001 et elle a été lavée de tout soupçon par une commission d'enquête américaine en 2004. Mais que sait-on des accusations qui ont pesé un temps sur des Saoudiens – 15 des 19 pirates de l'air des avions-suicides étaient saoudiens – et que pourraient faire resurgir des plaintes devant la justice américaine ?
Aucune preuve contre les Saoudiens
Le 15 juillet dernier, l'administration Obama a autorisé la publication de 28 pages, qui avaient été classées top secret pendant 15 ans après avoir été censurées dans un rapport d'enquête du Congrès fin 2002. Obama a ainsi voulu couper court aux rumeurs sur l'implication de Riyad dans le 11 Septembre. « Alors qu'ils se trouvaient aux États-Unis, certains des pirates de l'air du 11 Septembre ont été en contact, ou ont reçu un soutien ou une aide d'individus qui pourraient être liés au gouvernement saoudien », ont révélé ces 28 pages. Mais les agences américaines de renseignements n'ont pas pu « identifier de manière définitive » la nature précise de ces liens.
En décembre 2002, un an après les pires attentats jamais commis sur le sol américain, avec près de 3 000 morts, et revendiqués par Al-Qaïda, les deux commissions sur le Renseignement de la Chambre des représentants et du Sénat rédigent un rapport d'enquête. Mais le président américain de l'époque, le républicain George W. Bush, l'expurge de 28 pages dont il ordonne la classification, officiellement pour protéger les méthodes et les sources du renseignement. En outre, aux yeux de l'administration américaine, l'Arabie saoudite a été lavée de tout soupçon grâce à la publication en juillet 2004 d'un autre document officiel faisant autorité : le « rapport final de la Commission nationale sur les attaques terroristes contre les États-Unis ». Cette Commission du 11 Septembre avait en effet conclu qu'il n'y avait « aucune preuve que le gouvernement saoudien, en tant qu'institution, ou que de hauts responsables saoudiens, individuellement, aient financé l'organisation » Al-Qaïda pour perpétrer les attaques. La Maison-Blanche a réaffirmé en juillet dernier que les 28 pages aujourd'hui publiques « n'éclairaient en rien ni ne modifiaient les conclusions sur les responsabilités des attentats du 11 Septembre ».
Soupçons
En avril dernier, l'ancien vice-président de la commission sénatoriale de 2002, Bob Graham, avait réclamé que les 28 pages censurées soient publiées. Il accusait des responsables saoudiens, en poste au début des années 2000 à l'ambassade à Washington et au consulat en Californie, d'avoir aidé financièrement des pirates de l'air. Ainsi, la princesse Haïfa al-Fayçal, épouse de l'ambassadeur saoudien de l'époque, le prince Bandar, avait été soupçonnée d'avoir fait parvenir à partir de 1998 jusqu'à 73 000 dollars, via un diplomate saoudien à San Diego, aux deux premiers pirates de l'air arrivés aux États-Unis en 2000, Nawaf al-Hazmi et Khalid al-Mihdhar. Mais la Commission du 11 Septembre n'avait trouvé « aucune preuve que la princesse saoudienne Haïfa al-Fayçal ait apporté des fonds au complot, que ce soit directement ou indirectement ».
Des soupçons ont également pesé sur Omar al-Bayoumi, un responsable saoudien de l'aviation civile installé en Californie et qui se serait lié d'amitié avec Nawaf al-Hazmi et Khalid al-Mihdhar. Interpellé en Angleterre dix jours après les attentats, interrogé par les autorités britanniques et américaines, il avait été relâché sans être poursuivi. Et la Commission du 11 Septembre l'avait lui aussi blanchi sur la foi d'une enquête du FBI. Enfin, Fahad al-Thumairy, imam d'une mosquée de Los Angeles et diplomate accrédité au consulat saoudien à la fin des années 1990, avait été soupçonné d'avoir aidé les pirates de l'air à s'installer en Californie et il avait eu des contacts avec Omar al-Bayoumi. Mais d'après la commission du 11 Septembre, Bayoumi avait expliqué aux enquêteurs américains que ses discussions avec l'imam étaient « strictement religieuses »
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