mardi 20 mars 2018

Rachid Benzine : « Islam de France : gare aux fausses “bonnes idées” »

Les pistes que semble privilégier le gouvernement pour organiser l’islam de France sont peu réalistes, tant juridiquement que sociologiquement, juge l’islamologue dans une tribune au « Monde ».
LE MONDE | • Mis à jour le | Par
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Devant la Grande Mosquée de Paris, le 1er septembre 2017.


Tribune. Le président Emmanuel Macron a décidé de prendre à bras-le-corps le dossier de l’organisation de l’islam de France, et on ne peut que s’en féliciter. Pourra-t-il réussir là où ses prédécesseurs ne sont parvenus à rien de satisfaisant depuis presque quarante ans, malgré des efforts respectables ? Un des avantages du jeune président est de ne pas se considérer lié par des pesanteurs héritées du passé, et de privilégier l’efficacité pragmatique sur les politesses hypocrites.
Mais jusqu’où pourra-t-il faire fi de ces héritages ? La situation est loin d’être simple, non seulement en raison du principe français de séparation qui interdit – normalement ! – à l’Etat de s’immiscer dans l’organisation des cultes ; mais plus encore du fait d’un islam des musulmans de France extrêmement pluriel, traversé de conflits et d’intérêts contradictoires.
Surtout, on peut avoir légitimement le sentiment que l’immense majorité des fidèles du Coran en France se montre peu intéressée par la mise en place de structures censées la représenter. Un signe de « privatisation » et d’individualisation de la foi des gens ? Ou bien un abandon dans les mains de ceux – souvent les plus zélés et les moins ouverts aux valeurs des sociétés démocratiques – qui ont la réputation d’être « meilleurs religieux » et « plus savants » qu’eux ? Les deux phénomènes sont probablement à l’œuvre ensemble.

Même si le président Macron s’est, jusqu’ici, peu exprimé sur le sujet, on connaît les thèses et propositions qui lui sont présentées. L’une des premières est la rupture avec les influences dites « étrangères » au profit d’un islam « des musulmans de France ». La proposition est séduisante. Mais peut-on extraire de « toute influence étrangère » – ou de tout « attachement étranger » – les musulmans de France ? Est-ce possible et souhaitable ?
Déjà conviendrait-il de mieux définir quelles sont les influences étrangères, et en quoi celles-ci...

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