mardi 29 mai 2018

Marwan Muhammad, une personnalité centrale du militantisme issu de l’immigration mais qui divise

L’ancien responsable du Collectif contre l’islamophobie en France est à l’origine d’une consultation afin d’inciter les musulmans à choisir eux-mêmes comment le culte doit être organisé.
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Depuis qu’il a quitté la direction du collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), en octobre 2017, il scie, usine, assemble, cheville, polit. Lorsqu’il ne donne pas des formations « d’autodéfense intellectuelle » à de jeunes militants associatifs aux quatre coins de la France, Marwan Muhammad s’initie à l’art de la menuiserie. Tenons et mortaises n’auront bientôt plus de secret pour lui. Une façon comme une autre de se recentrer, après dix-huit mois passés à la tête du CCIF comme directeur exécutif. Dix-huit mois tendus, marqués par des controverses – notamment autour des arrêtés municipaux antiburkini. Avec l’annonce de cette « consultation des musulmans », le répit actuel pourrait cependant être de courte durée.

A 39 ans, Marwan Muhammad est une personnalité centrale mais aussi clivante du militantisme issu de l’immigration. De nombreux musulmans lui sont reconnaissants de défendre avec vigueur leur image, qu’ils estiment salie, dans le débat public, par des soupçons constants sur les thèmes de la radicalité religieuse et de la laïcité. Ses détracteurs, eux, l’accusent de nourrir la méfiance entre la République et les musulmans et d’être un contrebandier d’un islam politique.

« Musulman lambda »

Porte-parole (2010-2014) puis directeur exécutif (2016-2017) du CCIF, il a efficacement fait décoller les adhésions à cette association fondée en 2003, à l’époque de la discussion de la loi contre le voile à l’école. Il a bénéficié pour cela de la décision du Conseil d’Etat, saisi par la Ligue des droits de l’homme et le CCIF, de suspendre l’arrêté antiburkini pris par le maire de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes), à l’été 2016.
S’il a quitté la direction du CCIF, il ne s’est pas pour autant tenu à l’écart de l’actualité des derniers mois. En février, il a cosigné une tribune intitulée « Pour une justice impartiale et égalitaire » en faveur de Tariq Ramadan, mis en examen pour viols, avant de se tenir par la suite à l’écart de la campagne de soutien à l’islamologue. En avril, il a publié sur Mediapart une réponse indignée au « Manifeste contre le nouvel antisémitisme » qui dénonçait l’existence d’un « antisémitisme musulman », qualifiant ce texte de « raciste ».
Aujourd’hui, c’est en « musulman lambda » qu’il propose de mettre ses qualités d’organisateur et son épais carnet d’adresses au service de la régulation du culte musulman. Il y a peu de chance pour que cela se fasse sans difficultés. Pour tenter d’entraîner et d’assembler les pièces éparses de l’islam de France, il pourra puiser dans ses compétences nouvelles de menuisier. Encore une affaire de tenons et de mortaises, en somme.

Le ramadan 2018 débutera le jeudi 17 mai en France

La date a été décidée mardi par le Conseil français du culte musulman, à l’issue d’une cérémonie de fixation du début de ce mois sacré pour l’islam.
Le Monde.fr avec AFP | • Mis à jour le
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Le Conseil français du culte musulman (CFCM), à l’issue d’une cérémonie de fixation du début du mois de jeûne, de partage et de prière, a annoncé mardi 15 mai au soir que le ramadan commencerait jeudi 17 mai en France.

Le président de l’instance représentative de l’islam auprès des pouvoirs publics, Ahmet Ogras, a fait cette annonce à la grande mosquée de Paris, en présence des représentants des principales fédérations qui structurent la deuxième religion en France.
Ces dernières années, les grandes fédérations ont recherché l’unité entre elles et avec les principaux pays musulmans, de la péninsule Arabique au Maghreb, sur la question des dates du ramadan, qui a parfois viré au casse-tête. Elles veulent ainsi éviter la division parmi les fidèles du Prophète, qui aurait prescrit dans un hadith (commentaire oral) :
« Ne jeûnez que lorsque vous verrez le croissant lunaire et ne rompez le jeûne que lorsque vous le verrez aussi. »
Ledit croissant n’étant pas visible mardi, le ramadan débutera jeudi, a décidé le CFCM, qui a fait sienne l’observation lunaire privilégiée par une majorité de fidèles.
Mais les partisans du calcul astronomique à l’avance tablaient depuis longtemps sur un début du ramadan le 16 mai : certains fidèles commenceront donc à jeûner dès mercredi, notamment parmi les musulmans d’origine turque ou gravitant dans la sphère d’influence de la confrérie des Frères musulmans.

Un des piliers de l’islam

Durant le ramadan, un des piliers de l’islam, les croyants sont invités à s’abstenir de boire, de manger et d’avoir des relations sexuelles, de l’aube — dès que l’on peut « distinguer un fil blanc d’un fil noir », dit le Coran — jusqu’au coucher du soleil. Selon des études, 70 % à 80 % des cinq millions de fidèles en France observent le ramadan.
Le jeûne est prescrit aux musulmans pubères, mais des dispenses sont prévues pour les voyageurs, les malades, les personnes âgées, les femmes enceintes ou venant d’accoucher. Des compensations sont possibles pour les personnes empêchées ou dispensées (jeûne effectué ultérieurement, dons aux nécessiteux...).
Dans une quête d’ascèse et de purification, le fidèle peut méditer le Coran, participer à des veillées de prière et se montrer généreux avec les plus démunis.
La dimension sociale, conviviale, voire festive, est très importante après l’iftar, repas quotidien de rupture du jeûne. Le ramadan s’achève par l’Aïd el-Fitr, la « fête de la rupture du jeûne », qui devrait avoir lieu vers le 15 juin cette année.
Mardi soir, Ahmet Ogras a également demandé au mufti de la grande mosquée de Paris, présent lors de cette courte « nuit du doute », d’élever une prière « pour toutes les victimes du terrorisme mais surtout une prière pour les martyrs d’hier », lundi, dans la bande de Gaza. Près de 60 Palestiniens y ont été tués et 2 400 blessés par des tirs de soldats israéliens.
Le président du CFCM a aussi appelé les imams des quelque 2 500 mosquées et salles de prière en France à réciter la « prière de l’absent » vendredi, en mémoire de ces victimes.

Prêcheur, autoentrepreneur, père de famille : itinéraire d’un salafiste français

Cette branche controversée de l’islam a pris un essor important en France depuis une quinzaine d’années. Un de ses adeptes raconte son parcours.
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A la mosquée salafiste An-Ni’ma de Rezé (Loire-Atlantique), en 2015.

Il s’appelle Atef, c’est un colosse barbu aux yeux rieurs. A 35 ans, il croit en Allah comme au « Ciel et à la Terre ». C’était en hiver, à la terrasse d’une boulangerie de Cannes, face à la plage. Il a débarqué à moto, en blouson de cuir noir. Il aurait pu, méfiant, comme d’autres avant lui, proposer un rendez-vous en lieu clos, en présence d’un tiers de confiance. Mais il a opté pour le regard curieux des retraités matinaux venus promener leur chien sous les palmiers. Il s’est assis à l’une des dernières tables en plastique disponibles. Puis il a parlé fort et longtemps pour expliquer que oui, il n’aimait pas « l’islam modéré » parce que c’est un « islam politique, hypocrite », et que oui, son islam à lui, c’est la « salafiyya » (le salafisme), parce que ça l’avait guéri du « takfir », la haine.
Malgré la franchise affichée lors de ce rendez-vous, il a fallu de longs mois pour arriver jusqu’à Atef Oueslati, imam depuis plus de dix ans dans les milieux « salafis », comme ils se désignent. Près d’un an d’approche très difficile dans ces sphères rétives à toute sollicitation médiatique. A force de rencontres informelles avec les fidèles assidus de différentes mosquées franciliennes, hommes et femmes, un contact a toutefois fini par s’établir et plusieurs entretiens ont pu être menés. Atef Oueslati est le seul à avoir accepté de s’exprimer à visage découvert, livrant ainsi un témoignage rarissime sur son engagement et sur la proximité sensible de ce courant controversé de l’islam avec les milieux djihadistes.
Atef Oueslati incarne, en France, une catégorie de fidèles que personne n’a vu vraiment grandir : imam salafiste le vendredi, autoentrepreneur dans la restauration la semaine, père rangé de quatre enfants le week-end. En quinze ans, le nombre de ces adeptes de la « salafiyya » s’est multiplié sur le territoire national. En 2004, ils étaient à peine 5 000, en 2010 ils sont passés

En savoir plus sur https://www.lemonde.fr/religions/article/2018/05/16/precheur-autoentrepreneur-pere-de-famille-itineraire-d-un-salafiste-francais_5299569_1653130.html#1JVqUM8qmVxWkS7K.99
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Vous vous apprêtez à célébrer votre premier mois de ramadan, racontez-nous

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